jeudi 3 mai 2012

Niger & littérature


Afrique amère, peinture de Sani, 2009


J’ai la prétention d’être le seul auteur professionnel du Niger, c’est à dire quelqu’un qui tente de vivre de sa plume. La littérature nigérienne, ainsi que les autres activités artistiques, sont pratiquées par des personnes qui ont un autre métier en parallèle. J’ai été professeur de français jusqu’en 1998, et j’ai décidé d’arrêter pour me consacrer à l’écriture et diriger une compagnie de théâtre. On ne construit pas un pays sans diffuser des valeurs auxquelles tout le monde adhère. Les récents événements politiques qui ont eu lieu au Niger, à savoir un président démocratiquement élu deux fois qui décide de s’éterniser, ont été rendus possibles parce que, à un moment donné, on a réussi à faire admettre qu’un voleur pouvait se pavaner dans la rue sans raser les murs, qu’on pouvait tricher sur la place publique et s’en vanter. Si déjà la littérature permettait au Niger de laisser circuler ces valeurs sans lesquelles on ne peut avoir de société (sinon un vrai western où prévaut la loi du plus fort), on ferait un grand pas en avant. Le Niger n’est connu à l’extérieur de ses frontières que par ses sécheresses récurrentes et son coup d’état de vingt sept minutes, le plus rapide du monde. Pourtant, c’est un pays qui a des choses à dire, à partager avec le monde.

Extrait des réponses données par Alfred Dogbé au questionnaire adressé à 30 auteurs africains à l’occasion de la célébration du cinquantenaire des indépendances (Indépendance cha cha, éditions Magellan & cie, 2010).

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire