samedi 28 avril 2012

La réalité


Chaque fois qu’il m’arrive, en cours de route, de désespérer d’un projet d’écriture – quel qu’il soit -, c’est précisément parce que j’ai eu le sentiment d’avoir perdu contact avec la réalité, d’avoir été piégé, envoûté par des préoccupations techniques et formelles. A la limite, c’est une sorte de culpabilité que mon éducation littéraire m’a inoculée. Les gens qui m’ont donné le goût des lettres ont mis entre mes mains des livres et des auteurs qui ont compté par leur engagement social et politique. C’est un héritage très fort. Pesant, aussi. L’exercice, le défi, c’est de rester dans la création. Le plus difficile. Il  ne reste pas moins vrai que la « réalité » elle-même est devenue si fuyante, si diverse, si intense qu’on a le tournis, le sentiment de ne pas suivre, d’être largué par les événements. Et voici déjà le doute qui paralyse : qu’est-ce que je sais vraiment ? Qu’est-ce que j’ai vraiment compris de ce qui se passe autour de moi ?

Extrait du dialogue entre Jacques Jouet et Alfred Dogbé, Atelier du roman, décembre 2011.

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